Chaux

Des Rosiers, Joël, Chaux, Éditions Triptyque, t-poésie, 2015, 91 p.
Prix : 
29 $
ISBN : 
978-2-89741-047-6

La chaux est l'encre des écrits divins. C'est donc à un Dieu à la main coupée, à ce point humain, que tout poète s'adresse comme limite extrinsèque de tout savoir. Plutôt que de prendre la parole l'auteur a voulu être enveloppé, porté par elle, bien au-delà de tout commencement. La tentation est grande de se tourner vers ses poèmes antérieurs, ses champs de parfums et de sonorités. Cela reviendra à ignorer les traces d'une fulgurance plus ancienne: une terre vivante, une chaleur organique, la chaux, entre délire et prophétie, était entrée en lui dès les premiers jours de sa vie, dans cet espace du dedans, démesuré, insoupçonné, intemporel, qui est la vraie mesure de l'homme.

Sans doute avec Chaux est-ce le même poème différent qui se continue en déjouant toute attente. L'écriture en est plus avide, plus déchiquetée, plus rapace. Plus dévêtue aussi. Si parfois le thèmes s'estompent, c'est pour revenir plus tard, à coup de visions, sous la forme de leitmotiv, affermis mais pas identiques.

Le livre est divisé en trois parties: «Iles» (os du bassin), incarnation intensément marquée par la biologie ; «Voiles», pour dire l'inquiétude d'une apparition autant que d'une disparition ; et «Batteries», qui clôt la démarche du héros épique au rythme des «tambours furieux / qui fustigiez / les hommes communs». Ces répétitions, ces variations, ces coupures, ces retours en arrière permettent sans artifice de retrouver un poème enchanté, un chant indigène. Comme si toute l'œuvre était placée depuis le début sous le signe du poudroiement de la chaux: Si blanche l'étrangère en ce pays de feuilles (Édouard Glissant).